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Citylight
11 mars 2012

Solo

Solo - Jean-Pierre Mocky - 1970 - France. Avec Jean-Pierre Mocky, Anne Deleuze, Henri Poirier Denis LeGuillou


Mon préféré de Jean-Pierre Mocky, cinéaste incontournable du cinéma français. Il a réalisé une multitude de films depuis ses débuts dans les années 60 et a traité avec plus ou moins de réussite, des thèmes tels que la liberté de la presse (un linceul n'a pas de poches), la télévision (la grande lessive), la religion (un drôle de paroissien, le miraculé), la justice (vidange); le sport (L'arbitre) ou encore le milieu politique et ses magouilles pour le pouvoir (une nuit à l'assemblée nationale, l'albatros). Mocky n'hésite pas à s'en prendre aux institutions et différents pouvoirs, souvent à travers le prisme du comique mais aussi parfois avec un air plus grave. C'est le cas pour Solo.

Tourné en 1968, c'est un film qui a mis 30 ans pour être diffusé à la télévision en France ! Solo c'est un film de rage, certes un peu caricatural parfois, revenant à la période mai 68, où il est question d'un petit groupe d'activistes prônant l'action directe et passant à l'acte. Mocky y joue impeccablement le rôle du grand frère de l'un de ces activistes, et se distingue de ces derniers en optant pour une attitude anarchiste individualiste, moins rigoureuse, dogmatique et idéologiquement prégnante sur son quotidien, ce qui ne l'empêche d'être en opposition à la répression policière, la culture de la consommation et le monde politiquo-industriel marqué par la corruption et la dégueulasse-rie. Seulement lui il résiste en vivant sans se comporter comme un bon citoyen (c'est un voleur de bijoux), et semble abandonner tout espoir de résistance collective de type partisane, groupusculaire.

Ce qui fait un des grands intérêts de solo, c'est le climat qui y règne: présence policière bien marquée, dogmatisme révolutionnaire, pourriture des gouvernants et alliés économiques, propagande du pouvoir en place pour faire régner l'ordre. On peut y voir comme un témoignage brûlant de la France de la fin des années 60. Ce qui est assez amusant, c'est que ce film, lors de sa sortie, fit d'après Mocky quasi unanimité à gauche comme à droite, chacun pouvant tirer partie prix en fin de compte de l'aspect "témoignage" pour soit s'en prendre aux dogmatiques révolutionnaires, soit s'en prendre aux pouvoirs.

Outre le côté "témoignage" d'une époque, il est cependant indéniable que solo est un film de révolte. Le grand Cabral est excellent et le plus lucide sur son époque, il se distingue par son humour et à sa débrouille individuelle illégale, sans rechercher le bien être du bon citoyen mais plutôt la liberté la plus large possible. Bien que comprenant l'esprit de révolte des jeunes activistes, il n'en partage pas les moyens employés et semble au contraire y voir comme une autre aliénation.

Les dialogues sont jouissifs et atteignent de petits sommets d'humour dévastateur; le trajet en voiture entre la petite amie du jeune Cabral et le grand Cabral est à cet égard un des meilleurs passage du film: ironie sur le code de bonne conduite du bon français, constat désopilant sur l'attitude des classes dirigeantes ("y aura toujours des gros pleins d'soupe pour s'envoyer des petites pétasses en l'air"), naïveté des révolutionnaires dogmatiques qui se compliquent dangereusement la vie.

De manière plus générale, solo est également un film qui se laisse voir sans temps mort. Le rythme ne laisse en effet aucun répit, il y a comme un état d'urgence perpétuel et l'heure et demi passe très vite. L'atmosphère du déroulement de l'intrigue est très pesante et sombre, avec une BO des plus réussies la desservant parfaitement. L'étau se resserre au fur et à mesure de l'avancement du film, le climat y est de plus en plus oppressant, et la révolte semble confrontée à un mur répressif intouchable...Ca sent la révolte compromise par plus fort que soi et solo constitue un film finalement très sombre, bien que faisant la part belle à l'esprit de rébellion et contestataire pour un monde à transformer, malheureusement comme fatalement étouffé.

 

 


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